Son oeuvre à
Chaliers
Une halte de poésie au soleil
Parmi ses multiples immersions dans le paysage naturel, Natsuko Uchino conduit les écueils d’une aventure artistique et sociale sur l’humain et son environment. Observer les veines des matériaux, écouter les silences qui nous échappent, fouiller dans une lumière qui se cache, encouragent l’artiste à déployer un langage plastique et performatif sur ce qui nous est offert par la nature. Si ses œuvres composent des réflexions poétiques sur l’individu, elles répondent à la quête d’immanence à chercher dans la terre, à proximité d’une forêt, près d’un lac – une porte ouverte sur d’autres paradigmes possibles à explorer face aux ravages industriels qui contaminent les sols et embrument l’horizon.
Diplômée de la Cooper Union à New York (2007), Uchino initie la construction d’une ferme collective en permaculture pendant plus de cinq ans et y développe la céramique afin de fabriquer les contenants à sa production agricole. Depuis ses multiples expériences, dans le désert de Gobi, sur le rivages islandais ou dans le village artisanal de Tamba (Japon), la céramique intègre les potentialités de mise en scène et d’assemblage dessinant le fil rouge de ses installations, films et performances.
Dans la continuité d’un travail qui prend la forme du scénario évolutif à plusieurs entrées (La Déambulation agroalimentaire, 2013 ; La Pastorale, 2014 ; La Pythie, 2015), Natsuko Uchino propose à l’occasion de la Biennale de Saint-Flour, une promenade singulière et une halte pour les marcheurs à travers les différents visages de Chaliers. Si l’unique chemin du village permet aux visiteurs d’apprécier les beautés d’un paysage foisonnant, l’oeuvre d’Uchino s’organise autour d’un ensemble de sculptures et d’installations comme autant d’empreintes paysagères engagées par l’artiste dans sa relation à la situation géographique. L’usage de la terre, de la céramique et du bois, dialogue avec le miroir insolite de cet écrin qui borde la Truyère. Si en préambule, de petits objets jonchent à l’entrée du pont telle l’invitation d’un manifeste, ce parcours inédit accueille du mobilier en Séquoia dédié au repos et à la lecture, une fontaine d’eau accompagnée d’un service en poterie pour s’abreuver sous un soleil de plomb, et un mobile métallique composé de chargeurs solaires pour répondre à la crainte d’être perdu sans téléphone portable au milieu de nulle part.
À la croisée de l’intervention artistique et de la fonction sociale, toutes ces formulations hybrides affirment l’importance d’investir et de préserver nos espaces publiques. Ils rappellent les besoins de l’aventurier contemporain qui arpente la route jusqu’au point culminant de Chaliers pour admirer le dernier flirte d’une sculpture avec les frétillements du vent face aux formes onduleuses de la vallée.
Texte de Mehdi Brit
En ce sens, les contours explorés par Uchino, façonnent de nouvelles perspectives sur la poésie d’un lieu. Enquêter sur cette histoire et le quotidien de ce village, constitue autant de témoignages à décrypter que d’indices sur lesquels l’inspiration berce naturellement les couleurs et les motifs d’une esthétique colorée d’affects – un espace fédérateur dédié à la rencontre qui se dessine à proximité des maisons et de ses habitants.
Natsuko Uchino a présenté son travail à la Elaine–MGK Bâle, Kunsthalle Baden- Baden, Kunsthal Charlottenborg Copenhague, Centre d’art et Paysage – Ile de Vassivière, Beaux-arts de Bourge-Centre Céramique La borne, Le Musée de la Chasse et de la Nature Paris, Le Jardin des Plantes Paris (In Process-FIAC), les Laboratoires d’Aubervilliers, La Friche Belle de Mai, Marseille, Fondation Luma (Arles), New Museum New York, Paris-Photo, Silencio (…). Récemment, elle a participé à l’exposition Je t’épaule tu me respires, Galerie Marcelle Alix (Paris). Elle enseigne la céramique et la sculpture aux Beaux-arts du Mans. Elle est représentée par les galeries Green Tea (JP) et Last Resort (DK). Née en 1983 et installée dans le sud de la France, elle travaille entre Paris, le Japon et New York.